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Reçu avant avant-hier

Sylvain Forge : “La technologie ne donne pas de sens, elle offre des distractions”

L’homme a toujours été préoccupé par la mort. Quel sens donner à sa vie quand on ne connait pas l’échéance, et si nous connaissions celle-ci, que ferions-nous du temps restant ? Oracle est une application qui vend cette information à ses clients et si certains acceptent ou changent de vie, d’autres adoptent un comportement violent.

“Écrire est un artisanat” : entretien avec Pierre Jourde

Connu pour son approche critique des auteurs contemporains, mais aussi pour ses récits intimistes, comme Pays perdu (L’Esprit des Péninsules, 2003), Pierre Jourde est également docteur ès Lettres, spécialisé dans l’œuvre de Huysmans, fin connaisseur des écrivains décadentistes. Rien de surprenant, donc, à ce que ce nouveau et volumineux roman prenne place à la fin d’un XIXème siècle marqué par un positivisme étouffant, mais aussi par un retour à l’occulte, au mystère. Un entretien mené par Étienne Ruhaud.

Oser Dostoïevski : trois ans avec les Frères Karamazov

S’attaquer à un monument - certains diront le plus grand roman du monde - il faut oser. Après André Markowicz, dont la traduction des Frères Karamazov chez Actes Sud demeure une référence depuis 2001, et Emma Lavigne, qui a livré la sienne pour Gallmeister, c’est au tour de Sophie Benech de se confronter au géant russe. La traductrice signe chez Zulma une nouvelle version de ce texte vertigineux, résultat de près de trois années de travail.

Mariana Enríquez : “Ce monde est profondément bizarre”

15 octobre 2025 à 16:03

Mariana Enríquez vient de publier, toujours aux éditions du Sous-Sol (trad. Anne Plantagenet), Un lieu ensoleillé pour personnes sombres. Avec ce recueil de nouvelles hantées par l'absence, les fantômes, et marquées en sous-terrain par une réalité brutale, elle confirme sa place parmi les auteurs et autrices qui comptent dans la littérature mondiale contemporaine. De passage en France pour la promotion du livre, elle a échangé avec nous sur l'étrangeté du quotidien, sa vision de l'écriture, les fantômes et la musique.

Cosey : “Je préfère une histoire d’amour à un complot intergalactique”

14 octobre 2025 à 11:25

Dans un café de la rue Vieille-du-Temple, Cosey parle doucement, presque à mi-voix. Il pèse chaque mot comme s’il dessinait encore, sur la nappe de papier, les contours d’un souvenir. Son regard se pose parfois sur la tasse, parfois au loin. Il évoque Yiyun, sa nouvelle bande dessinée publiée au Lombard, avec la même précision tranquille qu’il accorde à ses planches : un geste lent, mesuré, presque méditatif.

Nicolas Framont : “Il faut que la classe dominante ait peur”

Évoquer Luigi Mangione, ce jeune beau gosse devenu symbole, après l’assassinat d’un PDG américain, c’est s’aventurer sur une ligne de crête, là où la colère sociale flirte avec la violence politique. Où beaucoup préfèrent détourner le regard, Nicolas Framont, cofondateur de la revue Frustration, choisit d’y plonger. Dans Saint Luigi, il affronte ce geste sans complaisance, avec un style direct. Un texte fort, à la fois nourri par des faits édifiants et par son propre parcours — entre l’accompagnement de la fin de vie de sa grand-mère, et son expérience de conseiller parlementaire.

Le Verdict, de Franz Kafka, traduit par Jean-Philippe Toussaint : l’éclipse du monde

13 octobre 2025 à 10:53

Par une nouvelle version parue chez Minuit (octobre 2025), Jean-Philippe Toussaint nous offre du Verdict un texte hypnotique où sa langue redouble celle de Kafka à la faveur d’une clarté portée au carré par le jeu de la traduction, si l’on veut. Cela est d’autant plus vrai qu’à la nouvelle en question succèdent des mots de l’auteur-traducteur lui-même, en forme de commentaire lumineux.

“La fiction permet de rendre visibles ceux qu’on a oubliés”

13 octobre 2025 à 10:23

Il parle d’une voix douce, presque retenue, comme si chaque mot devait d’abord traverser la mémoire avant d’atteindre le présent. Alexandre Courban ne revendique pas un passé, il le reconstruit, patiemment, avec les outils de l’historien et la sensibilité du romancier. Chez lui, l’histoire n’est pas une matière figée : elle palpite encore sous la surface du récit.

Stéphanie Pérez : “Écrire, c’était apprendre à respirer autrement”

12 octobre 2025 à 13:22

Sous la plume de Stéphanie Perez, Le Gardien de Téhéran devient bien plus qu’un récit historique : une méditation sur la mémoire, la beauté et la fidélité à ce qui nous élève. À travers le regard d’un homme simple, l’autrice rend hommage à tous ceux qui, dans les moments les plus sombres, choisissent de sauver la lumière. Lauréate du Prix Littérature Lire en Poche 2025, elle revient sur les origines de ce texte où s’entrelacent l’Histoire, la mémoire et la lumière fragile de l’art.

 

"On ne doit jamais traiter les gens sans dignité"

À la soirée d'inauguration de la Fête du Livre de Saint-Étienne, le public a assisté au double triomphe d'un auteur local. Pierre Mazet a remporté coup sur coup le Prix Claude-Fauriel et le Prix Lucien-Neuwirth pour son roman L’Inconnu des barricades, paru aux éditions du Caïman. Des distinctions hautement symboliques, attribuées à un écrivain discret, humble, mais tenace, dont le parcours – fait de patience, d’humanité et d’attachement à ses origines – incarne à merveille l’esprit stéphanois.

“Arrêter le temps, c’est vivre pleinement” : la philosophie SF de Lou Jan

11 octobre 2025 à 10:03

Autrice autodidacte et passionnée, Lou Jan s’est imposée en quelques années comme une voix singulière de la science-fiction française. Derrière son apparente douceur se cache une écriture ramassée, nerveuse, traversée par une quête philosophique : comprendre ce que le temps, l’amour et le corps disent de notre humanité. Rencontre avec une romancière qui se définit elle-même comme « une autrice de blanche qui écrit de la science-fiction ».

“Écrire pour la jeunesse, c’est écrire pour des âges où tout bouge” - Timothée de Fombelle et François Place

10 octobre 2025 à 14:36

Sous le chapiteau du salon Lire en Poche, la conversation entre François Place et Timothée de Fombelle a des airs de franche camaraderie, autant que de retrouvailles complices. Deux voix majeures de la littérature jeunesse, deux artisans des mots et des images qui se retrouvent avec la bienveillance de vieux compagnons de route.

“Pour favoriser l'accès au livre, la cité doit être nourrie par des librairies”

10 octobre 2025 à 11:52

Cette année, la ville de Gradignan célèbre la vingtième édition de son festival Lire en Poche : une ville qui se raconte par ses livres, et le pari d'une ville qui lit, nous raconte le maire, Michel Labardin. Il revient avec nous sur l’histoire de la manifestation, où politique et culture ne font qu'un – et reflètent le rapport de l'édile à la lecture : un socle commun, pour faire société.

“Devenir le visage de la littérature centrafricaine”

De loin, on ne peut pas deviner l’énorme énergie que déploie Landry Ouoko Delombaut pour faire évoluer le livre dans son pays : la République centrafricaine. À Bangui, il crée une maison d’édition, anime un réseau de clubs de lecture, coordonne des rencontres littéraires, active de petits points de vente… Propos recueillis par Agnès Debiage (ADCF Africa).

"Quand on écrit un premier roman, on vous prépare à l’invisibilité"

Avec son premier roman, Il pleut sur la parade (Gallimard), Lucie-Anne Belgy s’impose d’emblée comme une nouvelle voix littéraire à suivre. Finaliste du prestigieux Prix des Deux Magots, elle explore avec justesse les complexités des couples mixtes, des héritages culturels et des fragilités familiales.

Avec Voyage, voyage, Victor Pouchet transforme le deuil en odyssée intime

Finaliste du Prix des Deux Magots 2025, Victor Pouchet signe avec Voyage, voyage (L'Arbalète), son cinquième roman, un road novel tendre et mélancolique : après une fausse couche, Orso et Marie fuient Paris, à bord d’une vieille Nevada. Rien à voir avec le tube de Desireless - sinon cette intuition : pour survivre, il faut parfois partir très loin, même à deux heures de chez soi.

"La jeunesse irakienne ne veut plus rien avoir à faire avec la guerre"

30 septembre 2025 à 16:24

Finaliste du Prix des Deux Magots 2025, Feurat Alani publie à la rentrée littéraire chez JC Lattès, Le ciel est immense. Ce roman, traversé par la mémoire, l’Histoire et l’absence, raconte la quête d’un neveu pour retrouver la trace de son oncle Adel, pilote disparu en 1974. Après avoir livré un récit journalistique avec Le parfum d’Irak, l’auteur choisit cette fois la fiction pour tenter de combler les trous laissés par les non-dits. Rencontre avec un écrivain qui fait dialoguer intime et collectif, réalité et imaginaire.

Joseph Incardona, la rage du roman et la tendresse au cœur du noir

29 septembre 2025 à 18:19

Finaliste du Prix des Deux Magots 2025, Joseph Incardona publie chez Finitude Le monde est fatigué, un récit tendu où l’intime se frotte au politique, où l’action épouse la pensée, où un corps éprouvé garde pourtant ses secrets.

Éditions Basset : une maison d’édition face au crime organisé

La rentrée littéraire 2025 est un bon cru avec la première parution chez Basset Éditions, maison dirigée par Brünhilde Delhommeau, de Dans les coulisses de la ‘Ndrangheta de Gabriella Marà. Cette nouvelle maison d’édition souhaite publier des essais, des enquêtes sur les organisations criminelles, avec une vocation internationale. 

“Écrire un roman, c’est comme résoudre un grand puzzle. Et j'adore les puzzles”

22 septembre 2025 à 17:17

Le Prix du roman Fnac 2025 vient d’être attribué à Les Éléments de John Boyne (éd. JC Lattès, trad. Sophie Aslanides). Un roman en quatre volets qui scrute sans complaisance la mécanique des violences et l’héritage psychologique qu’elles laissent derrière elles. Et la possibilité de rompre — ou non — le cycle des abus.

Orson Welles et Cioran par Anca Visdei, Goncourt de la biographie

20 septembre 2025 à 13:33

J’ai d’abord entraperçu la tête massive d’un certain Orson Welles sur la couverture d’un livre. Intrigué, je me suis approché. Puis mon regard est tombé sur un autre visage, plus pointu : celui d’Émile Cioran. Deux géants, deux faces antagonistes, et une même biographe, Anca Visdei. Lauréate du Prix Goncourt de la biographie 2025 pour sa peinture d'un « gai désespoir », elle est présente cette année au festival Livres dans la Boucle de Besançon, où elle déploie son énergie, sa verve et son esprit peu commun.

Simon Chevrier, Goncourt du premier roman : "Chaque mot est pesé"

19 septembre 2025 à 21:00

Je ne l’ai pas reconnu tout de suite. Sur les photos officielles, Simon Chevrier arborait un buzzcut impeccable. Le voilà maintenant avec pas mal de cheveux, et toujours ses yeux verts perçants. Invité au festival Livres dans la Boucle, l’auteur de 32 ans, couronné par le Prix Goncourt du premier roman 2025, revient sur l’aventure de son texte, Photo sur demande, récit cru et vibrant sur la solitude, le deuil et les relations tarifées, à Toulouse, à l’ère du Covid et des applications de rencontre.

Louis-Henri de La Rochefoucauld : "Les sentiments purs ont de l’avenir"

19 septembre 2025 à 17:03

Invité du festival Livres dans la Boucle de Besançon, Louis-Henri de La Rochefoucauld présente son dernier roman, publié en cette rentrée littéraire chez Robert Laffont, et déjà lauréat du Prix Cabourg du roman, L’Amour moderne. L’écrivain et critique littéraire réhabilite le vaudeville, et croque un univers de faux-semblants, de passions contrariées et de pouvoir masculin vacillant, en héritier à la fois de Balzac, de Sagan et des moralistes du XVIIe siècle, en digne descendant de son illustre aïeul. 

Les Sandales d’Empédocle, une librairie au cœur de Livres dans la Boucle

17 septembre 2025 à 12:45

À Besançon, la librairie Les Sandales d’Empédocle avance en terrain connu. Partenaire de longue date du festival, elle s’installe à nouveau dans la mécanique bien huilée de Livres dans la Boucle : répartition des auteurs, équilibre entre plateaux, circulation dans les lieux culturels de la ville. Laëtitia, libraire, raconte ce qu’elle voit remonter de la rentrée…

"Ce n’est pas qu’on n’aime pas Carrère ou Mauvignier, c’est qu’ils n’ont pas besoin de nous"

16 septembre 2025 à 18:51

Créé le 7 décembre 1933, le même jour que la remise du prix Goncourt à André Malraux, le prix des Deux Magots compte aujourd’hui parmi les plus anciennes distinctions littéraires françaises. En près d’un siècle d’existence, il n’a toutefois connu que trois présidents : l’extravagant Henri Philippon, le passionné (de Paris) au nom d'empereur Jean-Paul Caracalla, et depuis 2018, le distingué Étienne de Montety. Après le décès de l'auteur et l’éditeur en 2019, ce dernier a proposé à sa fille, Laurence Caracalla, de rejoindre le jury. 

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